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Page:Cicéron - Œuvres complètes - Panckoucke 1830, t.8.djvu/309

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SOMMAIRE

Les deux harangues De signis et De suppliciis sont, de toutes les Verrines, les plus connues, et les seules que l’on explique dans les écoles. La raison de cette préférence se trouve, sinon dans la supériorité de leur mérite, du moins dans l’avantage du sujet. En effet, bien que les autres discours contre Verrès offrent à un égal degré toutes les richesses, toutes les ressources de la plus brillante faconde, il faut convenir qu’à quelques passages près, où le sujet a permis à l’orateur de se montrer éloquent, le fond de ces discours n’est pas toujours attachant par lui-même. On peut excepter cependant la première harangue de la seconde Action, celle où Cicéron suit Verrès dans sa questure, dans sa légation, dans sa préture, en un mot, dans toute sa vie politique. Là il était facile à l’orateur de se montrer avec tous ses avantages, quand, par exemple, il avait à décrire des scènes aussi touchantes que la condamnation de Philodamus et de son fils. Mais avait-il les mêmes ressources pour intéresser dans la harangue sur la préture urbaine, toute consacrée à des discussions judiciaires, et surtout dans le discours sur les subsistances, où tous les faits sont de même nature, où le seul devoir de l’accusateur consiste à bien préciser les nuances qui distinguent chaque délit, où enfin tout est hérissé de détails d’administration locale, chargé de calculs et de répétitions nécessaires à la conviction du juge même le plus attentif ? Dans les deux dernières Verrines, au contraire, tout, par le fond même du sujet, favorisait le talent de l’orateur ; et Cicéron pouvait y déployer sans peine « cette heureuse abondance que les seuls ignorans peuvent confondre avec la prolixité verbeuse qui décèle un écrivain vulgaire. C’est là surtout qu’il a répandu ses trésors avec profusion ; c’est là que, selon l’expression du législateur de notre Parnasse, il sait

Passer du grave au doux, du plaisant au sévère.

Il est tour-à-tour, et quelquefois dans le même endroit, véhément et tempéré, majestueux et rapide, simple, pathétique, enjoué, sublime. Vous croyez voir tout ce qu’il dit. Ses transitions, ses