Page:Cicéron - Œuvres complètes - Panckoucke 1830, t.9.djvu/101

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le silence ! Il atteste que ce n’est pas le chef des pirates, vous en convenez ! Des cris de deuil et d’indignation éclatent contre vous. Cependant le peuple romain s’abstient de vous punir sur l’heure, il modère ses premiers transports, et remet le soin de sa vengeance à la sévérité des juges. Comment saviez-vous qu’on vous accuserait ? pourquoi le saviez-vous ? pourquoi en aviez-vous le soupçon ? Vous n’aviez point d’ennemis, et quand même vous en auriez eu, certes vous vous étiez comporté de manière à redouter peu les rigueurs de la justice. Est-ce qu’en effet, comme il est ordinaire aux coupables, le témoignage de votre conscience vous rendait soupçonneux et timide ? Quoi donc ! l’appareil de la puissance ne vous empêchait pas d’envisager avec effroi la perspective d’une accusation et d’un jugement ! Maintenant que vous n’êtes qu’un accusé convaincu par tant de témoins, vous osez douter de votre condamnation ! Vous appréhendiez, dites-vous, d’être accusé d’avoir livré au supplice un innocent à la place du chef des pirates. Eh bien ! pensiez-vous qu’il fût bien utile à votre justification d’attendre que vous fussiez traduit en justice et forcé par mes instances réitérées, pour représenter après un si long temps votre prétendu pirate devant des gens qui ne l’ont jamais connu ? Ne valait-il pas mieux le faire décapiter au moment de son arrestation, à Syracuse, sous les yeux de ceux dont il était connu, en présence de toute la Sicile ? Voyez quelle différence entre les deux partis à prendre : alors vous n’aviez nul reproche à craindre ; aujourd’hui vous n’avez point d’excuse. Aussi tous les généraux ont-ils pris le premier parti : nul autre avant vous, nul autre, excepté vous, n’a donné l’exemple du contraire. Vous avez garde chez vous un pirate vivant : combien de temps ? Tant qu’a