Page:Cicéron - Œuvres complètes - Panckoucke 1830, t.9.djvu/33

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états, penchant vers leur ruine, recourir, quand ils ont perdu toute ressource et toute espérance, à des moyens extrêmes, et qui ne font qu’accélérer leur perte. Alors les condamnés sont réhabilités (11), les détenus remis en liberté, les bannis rappelés, et les jugemens annulés. A de tels symptômes, qui ne reconnaît que la chute d’un gouvernement est inévitable, et qu’il ne lui reste plus aucun espoir de salut ?

Cependant, si quelquefois on a pris ces mesures extrêmes, elles n’avaient d’autre but que d’affranchir du supplice ou de l’exil des citoyens illustres ou populaires. Ce n’était point au reste par leurs juges eux-mêmes qu’ils étaient délivrés ; ce n’était pas non plus immédiatement après la sentence ; enfin ils n’avaient point été condamnés pour des crimes qui missent en danger la fortune et la vie de tous les citoyens. Mais ici nous voyons un attentat jusqu’alors inouï, un attentat si extraordinaire, que son auteur, plus que le fait lui-même, le rend croyable. Ce sont des esclaves que celui-même qui les a jugés, a soustraits tout à coup au glaive de la loi ; et ces esclaves avaient été condamnés pour un crime que tous les hommes libres devraient payer de leur tête et de leur sang.

Ô l’admirable général ! Non, ce n’est plus au brave Man. Aquillius, c’est aux Paul-Emile, aux Scipions, aux Marius qu’il faut le comparer. Quelle prévoyance au milieu des alarmes et des dangers de sa province ! À peine s’est-il aperçu qu’en Sicile les esclaves sentaient leurs esprits s’échauffer au bruit de la guerre allumée par les esclaves en Italie, comme il sait contenir leur audace par la terreur ! Il ordonne d’arrêter les séditieux : qui ne tremblerait pas ? Il cite les maîtres devant son tribunal : quoi de plus effrayant pour des esclaves ? Il pro-