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Page:Clapin - Sensations de Nouvelle-France, 1895.djvu/90

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Sensations de Nouvelle-France

Une république franco-américaine, par exemple, libre et indépendante par elle-même, et ne conservant, de ses attaches avec toi, que l’honneur de ton protectorat, quel complément plus glorieux pourrais-tu jamais rêver pour l’œuvre de civilisation entreprise ici autrefois par tes navigateurs et tes soldats avec une telle maestria, et que seul un concours de circonstances fatales a pu t’empêcher dans le temps de mener jusqu’au bout.

Depuis quelques instants, là-bas, la nuit avait pâli, et une sorte de buée lumineuse gagnait le zénith, noyant les uns après les autres les innombrables clous d’or des étoiles. Et voici que maintenant, au raz de l’horizon d’en face, cette buée elle-même vient de s’éclairer de reflets lointains d’incendie. Un moment encore, puis c’est un embrasement qui s’irradie en raies d’un rouge sanglant. Soudain, un gigantesque feu de paille flamboie, et, de ce noyau de flammes, la lune enfin émerge, montrant un disque démesurément agrandi, puis monte dans une majesté tranquille, vraiment reine et souveraine de la nuit. Et rien que — au sortir de tout ce noir de tout-à-l’heure — de m’être senti ainsi enveloppé