Page:Clarac - Musée de sculpture antique et moderne, 1841.djvu/33

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de variétés ou de changemens. Un sujet ou la manière de le rendre avait obtenu du succès, il avait fait la réputation d'un statuaire ; ceux qui auraient pu se présenter comme ses rivaux, mettant, à ce qu’il paraît, de côté tout amour propre, et s’unissant au public pour ajouter à la renommée de l'ouvrage qu'il aimait, se plaisaient, en quelque sorte à le multiplier en en répandant des copies plus ou moins exactes selon le talent de chacun. Si l’on y apportait quelques modifications, elles n’étaient assez marquantes pour faire disparaître le premier type original qui avait servi de modèle, On trouvait, pour ainsi dire, parmi tous ces enfans, un certain air de famille ; qui permettait de remonter à celui qui en était comme le chef, et auquel ils le devaient. Quelques caractères créés par le génie des grands maîtres, des Phidias, des Alcamène, des Polyctète, des Scopas, des Praxitèle, sont devenus presque sacrés : c’étaient des divinités descendues pour eux de l’Olympe, et qui s’étaient en leur faveur changées en marbre et en bronze. On n’en approchait qu'avec vénération. Si on les copiait, ce n’était qu'avec un religieux respect. L’on n’avait pas la prétention d’aller au delà de ce qui, par l'assentiment général était devenu l’expression de la beauté et de la divinité. Ce devait bien être une cause de monotonie dans les productions de l’art, mais aussi conservait on des types auxquels on reconnaissait une grande supériorité sur leurs émules. En voyant, en admirant certains chefs-d’œuvre antiques, et ce qui nous reste est peu de chose auprès de ce que nous avons à regretter, peut être serait on tenté de renoncer à l’idée de la perfectibilité du talent et de l’esprit humain, et à l’espoir de surpasser jamais ces grands maîtres, qu'il ne nous est accordé de juger que de si loin, et peut être encore, la plupart du temps, que d’après des copies plus ou moins fidèles, plus ou moins mutilées, de leurs chefs-d’œuvre. D e quels torrens de lumière ne serions-nous pas éblouis, si tout à coup nous apparaissaient Phidias entouré de son école ; Praxitèle, de la sienne, environnés des sublimes productions de leur génie. Peut-être penserait on comme alors, avec raison, que le génie, l’imagination de l'homme, avaient un terme qu’ils ne pouvaient dépasser ; qu’il n’était accordé qu'à quelques êtres privilégiés et chéris des dieux de l'atteindre, et qu'il y avait présomption à vouloir s’élever plus haut vers des régions célestes interdites à nos efforts. On se contentait du type de beauté auquel était par- [XXX]