Page:Clarac - Musée de sculpture antique et moderne, 1841.djvu/6

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à toutes les époques ; plus aussi l'on sent à quel petit nombre il est donné d’acquérir tout ce qu'exige la tâche si difficile d'un antiquaire accompli qui devrait réunir toutes les facultés de I'esprit, de la mémoire et du goût, au sentiment intime des arts du dessin. Peut-être cette dernière qualité est elle celle qui brille le moins chez plus d'un antiquaire, auquel des études graves et sévères, loin des monumens, n’ont pas permis de la développer, et peut être Visconti lui-même, bien que nourri au milieu des chefs d'œuvre des anciens, ne la possédait il pas au même point que ses autres mérites. Peut être aussi parfois y aurait il lieu à appeler de ses décisions sur la partie intrinsèque et technique de l'art, qu'il juge plus en antiquaire épris de la rareté ou de la singularité, qu'en artiste qui considère l'art en lui même, et sous le rapport de sa valeur propre et de sa beauté. Il en est souvent ainsi de bien des antiquaires qui, séduits par l'attrait du caractère antique, donnent, en conscience comme beaux, des ouvrages qui, ne se recommandant ni par l'invention, ni par l’intention, devraient, sous le point de vue du dessin et de l'exécution, exciter moins d'éloges que de critiques. Un des grands mérites de Visconti, et qu'on désirerait quelquefois à plusieurs des savans qui cherchent à le trouver en défaut, c’est d'être très-sobre d’érudition lorsqu'elle n'est pas indispensable, et de se faire bien comprendre : grand avantage, et qui dépend encore plus de celui qui discute que de son lecteur. Et certainement tant que la science de l'antiquité conservera quelque charme, et tant que l'on s’occupera de ses monumens, heureux seront les ouvrages qui pourront être jugés dignes d'être comparés à ceux de Visconti, et qui, offrant aux recherches une source aussi pure, aussi abondante, inviteront à y puiser à longs traits avec autant de plaisir et de fruit !

Je n'osais espérer arriver à ce but réservé à quelques élus de la science, en publiant, tel qu'il était, un ouvrage sur l'archéologie et sur les arts dont je m'occupais depuis longtemps. Une nouvelle carrière m'imposait de nouveaux devoirs et envers le public et envers moi même. Après tout ce qu’avaient déjà fait paraître sur les musées de l’Europe des savans de grand talent, je ne pouvais me dissimuler qu'il ne fût fort à craindre qu'il ne me restât plus qu’à glaner ce qu’ils auraient négligé çà et là dans les riches moissons qu'avaient produites de toutes parts les domaines de l'antiquité. Mais [III]