Page:Claudel - Connaissance de l’est larousse 1920.djvu/42

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de têtes vivantes, d’où émergent les piliers et les deux lions de grès à gueules de crapauds que coiffent des enfants assis. C’est un pavage de crânes et de faces rondes et jaunes, si dru qu’on ne voit pas les membres et les corps ; tous adhèrent, les cœurs du tas battant l’un contre l’autre. Cela oscille et d’un seul mouvement, tantôt tendant un rang de bras, est projeté contre la paroi de pierre de la scène, tantôt recule et se dérobe par les côtés. Aux galeries supérieures, les riches et les mandarins fument leurs pipes et boivent le thé dans des tasses à soucoupes de cuivre, envisageant comme des dieux le spectacle et les spectateurs. Comme les acteurs sont cachés dans leur robe, c’est ainsi, comme s’il se passait dans son sein même, que le drame s’agite sous l’étoffe vivante de la foule.