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chap. xiii. — des cantonnements.

motif qui porte à agir ainsi est plus spécieux que réel, En effet, si les cantonnements sont normalement établis, l’ennemi ne se hasardera jamais à réquisitionner sur l’espace relativement restreint et suffisamment surveillé qui s’étend, sur la surface même de ces cantonnements, entre deux grandes subdivisions d’armée groupées chacune autour de son centre respectif et ne laissant entre elles que le terrain nécessaire à leur rassemblement en bataille. Ce ne sont donc que les ailes extrêmes des cantonnements qu’il s’agit de garantir dans ces circonstances, et on dispose pour cet objet de moyens beaucoup plus simples et plus rationnels que ceux que l’on peut tirer de l’éparpillement même de l’armée.

Lorsqu’on place le point de rassemblement en avant des cantonnements, on se propose, cela va de soi, de couvrir directement ces cantonnements. Il est certain, en effet, qu’une troupe qui prend précipitamment les armes ne peut manquer de laisser dans les lignes qu’elle quitte ainsi une quantité de retardataires, de malades, de bagages et d’approvisionnements qui seraient exposés à tomber aux mains de l’ennemi si le point de rassemblement était pris en arrière des cantonnements mêmes.

On peut craindre aussi, dans le même cas, que des détachements de cavaliers ne parviennent à dépasser ou à culbuter l’avant-garde, et ne tombent à l’improviste sur les régiments ou sur les bataillons encore isolés les uns des autres pendant les mouvements de concentration. Ce sont là des dangers que l’on évite, au contraire, en choisissant le point de formation en avant du front des cantonnements, car alors même qu’au moment de l’apparition de l’ennemi les troupes ne se trouveraient pas encore assez concentrées pour opposer tout d’abord une résistance absolue, les premières arrivées en position