Page:Cleland - Mémoires de Fanny Hill, femme de plaisir, 1914.djvu/101

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couronnes de laurier pour en ceindre le front de leurs chers, doux et impotents maris…

« … Mme R…ds…n prend ordinairement soin de rassembler chez elle des parties suivant qu’elle les juge satisfaisantes aux deux sexes, mais elle a été quelquefois fautive d’erreur dans son jugement (comme il est arrivé à l’infortuné Byng) ; et quoiqu’elle ait reçu mille compliments avantageux du côté mâle et une multiplicité de réprimandes et d’abus de la part des dames, elle a toujours eu le bonheur de s’en tirer avec avantage, malgré les fréquentes et sévères mortifications que ses erreurs lui ont attirées et lui font essuyer journellement.

« Le duc de A… vint un soir avec plusieurs de ses amis dans ce séminaire ; ils pensèrent que les dames devaient être contraintes de capituler sur leurs conditions ; ils se trouvèrent tous trompés dans leur attente ; ils se retirèrent, à l’exception d’un seul qui crut qu’en leur absence il pourrait vaincre Miss L…n qui passait pour une prude et qui, au rapport de plusieurs personnes, n’avait jamais cédé à aucun homme, malgré qu’elle fréquentât la maison de Mme R…ds…n. Il commença d’abord par railler sa prétendue modestie et lui dit qu’il voulait la convaincre qu’il n’y avait rien de moins réel dans le monde femelle que la chasteté ; il assura qu’il avait scrupuleusement étudié le sexe pendant plusieurs années, ses artifices, ruses, stratagèmes, affectations, hypocrisie et dissimulation ; il ajouta qu’afin de raisonner avec précision sur ce sujet, il avait, avec beaucoup de travail et d’assiduité, formé une échelle des passions amoureuses du sexe femelle et de leur continence prétendue, laquelle il se proposait de présenter à la Société royale et pour laquelle il recevrait, comme il n’en doutait point, son approbation et ses remerciements ; en disant cela, il tira de sa poche un papier qui était intitulé :