Page:Cleland - Mémoires de Fanny Hill, femme de plaisir, 1914.djvu/123

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Le cireur se promenait, un petit panier à la main : Black your shœs, Your Honour ! Black, sir ! black, sir ! (Faites noircir vos souliers, Voire Honneur ! Noircir, monsieur ! noircir, monsieur !)

Il sollicitait ainsi les élégants et choisissait de préférence les allées malpropres où les beaux ne s’aventuraient pas sans se salir.

À ce propos Casanova remarque :

« Un homme en costume de cour n’oserait aller à pied dans les rues de Londres sans s’exposer à être couvert de boue par une vile populace, et les gentlemen lui riraient au nez. »

Ajoutons que l’accent de la plupart des cireurs indiquait une origine irlandaise. Dans leur panier, ils portaient un trépied pour placer le pied du client, des brosses, des linges et du cirage, ce fameux cirage anglais qui n’est connu en France que depuis la moitié du XIX° siècle. Il faut ajouter que les petits cireurs faisaient encore métier de surveiller les prostituées pour le compte des maquerelles ou des logeuses, et tout en brossant à tour de bras, ils donnaient discrètement l’adresse de quelque maison fournie de jolies femmes comme était celle de Mme Cole, dans le roman de Cleland.

La marchande d’anguilles portait sur la tête son baquet plein de sable où se lovaient les anguilles. Elle allait ainsi depuis Old-Shadwell jusqu’au Strand en criant : Buy my eels ; a groat a pound live eels ! (Achetez-moi des anguilles ; un groat la livre d’anguilles vives !)

Rien d’étonnant à ce que le poisson soit abondant en Angleterre. Les poissonniers ont toujours été les plus nombreux des petits marchands qui parcourent les rues de