Page:Cleland - Mémoires de Fanny Hill, femme de plaisir, 1914.djvu/167

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cheval, grand, bien découplé, et, selon les apparences, un héros dans les joyeux ébats.

Je n’osais faire le moindre mouvement, ni respirer, de peur de manquer, par mon imprudence, l’occasion d’un spectacle fort intéressant ; mais la paillarde avait l’imagination trop pleine de son objet présent pour que toute autre chose fût capable de la distraire. Elle s’était assise sur le pied du lit, vis-à-vis delà garde-robe, d’où je ne perdis pas un coup d’œil de ses monstrueux et flasques appas. Son champion avait l’air d’un vivant de bon appétit ; et expéditif. En effet, il posa sans cérémonie ses larges mains, sur les effroyables mamelles, ou plutôt sur les longues et pesantes calebasses de la mère Brown. Après les avoir patinées quelques instants avec autant d’ardeur que si elles en avaient valu la peine, il la jeta brusquement à la renverse et couvrit de ses cotillons sa face bourgeonnée par le brandy. Tandis que le drôle se débraillait, mes yeux eurent le loisir de faire la revue des plus énormes choses qu’il soit possible de voir et qu’il n’est pas aisé de définir. Qu’on se représente une paire de cuisses courtes et grosses, d’un volume inconcevable, terminée en haut par une horrible échancrure, hérissée d’un buisson épais de crin noir et blanc, on n’en aura encore qu’une idée imparfaite,

Mais voici ce qui occupa toute mon attention. Le héros produisit au grand jour cette merveilleuse et superbe pièce qui m’avait été inconnue jusqu’alors et dont le coup d’œil sympathique me fit sentir des chatouillements presque aussi délectables que si j’eusse dû réellement en jouir. Puis le drille se laissa tomber sur la dame. Aussitôt les secousses du lit, le bruit des rideaux, leurs soupirs mutuels m’annoncèrent qu’il avait donné dans le but.

La vue d’une scène si touchante porta le coup de mort à mon innocence.