Page:Cleland - Mémoires de Fanny Hill, femme de plaisir, 1914.djvu/217

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s’occuper trop de mes affaires ; aussi envoya-t-elle une de ses amies, le jour fixé pour mon déménagement, me prendre et me conduire à mon nouveau logement, chez un brossier de R…-Street, Covent-Garden, juste à côté de sa propre maison, où elle n’avait pas de quoi me recevoir elle-même. Ce logement s’étant trouvé occupé depuis longtemps par des femmes galantes, le propriétaire était familiarisé avec leurs allures ; et pourvu qu’on payât le loyer, on avait pour le reste toutes les aises et toutes les commodités qu’on pouvait désirer.

Les cinquante guinées que m’avait promises M. H…, lors de notre rupture, m’ayant été dûment payées, mes effets d’habillement et tout ce qui m’appartenait emballés et chargés sur une voiture de louage, je les y suivis bientôt, après avoir pris congé du propriétaire et de sa famille. Je n’avais pas vécu avec eux dans un degré de familiarité suffisant pour regretter de m’en séparer, et cependant le fait seul que c’était une séparation me fit verser des pleurs. Je laissai aussi une lettre de remerciements pour M. H…, que je croyais à tout jamais perdu pour moi, comme il l’était en effet.

J’avais congédié ma servante la veille, non seulement parce que je la tenais de M. H…, mais parce que je la soupçonnais d’avoir été pour quelque chose dans sa découverte ; elle s’était peut-être vengée de ce que je ne lui avais pas confié mon intrigue.

Nous fûmes vite arrivées à mon logement, qui, sans être aussi richement meublé ni aussi beau que le précédent, était, en somme, aussi confortable et à moitié prix, quoique au premier étage. Mes malles, descendues en bon état, furent déposées dans mon appartement, où m’attendaient Mme Cole