Page:Cleland - Mémoires de Fanny Hill, femme de plaisir, 1914.djvu/250

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À peine Mme Cole eut-elle fini que la troupe folâtre des filles entra et renouvela ses caresses a mon égard ; j’observai avec plaisir que les fatigues de la nuit précédente n’avaient en aucune façon altéré la fraîcheur de leur teint ; ce qui venait, à ce qu’elles me dirent, des soins et des conseils que notre bonne mère abbesse leur donnait. Elles descendirent dans la boutique, tandis que je restai dans ma chambre à me dorloter jusqu’à l’heure du dîner.

Le repas fini, il me prit un léger mal de tête, qui me fit résoudre à me mettre quelques moments sur mon lit. M’étant couchée avec mes habits et ayant goûté environ une heure les douceurs du sommeil, mon galant vint, et me voyant seule, la tête tournée du côté de la muraille et le derrière hors du lit, il défit incontinent ses habits, puis levant mes vêtements, il mit au jour l’arrière-avenue de l’agréable recoin des délices. Il m’investit ainsi derrière et je sentis sa chaleur naturelle, qui m’éveilla en sursaut ; mais ayant vu qui c’était, je voulus me tourner vers lui, lorsqu’il me pria de garder la posture que je tenais. Après que j’eus resté quelque temps dans cette position, je commençai à m’impatienter et à me démener, à quoi mon ami m’aida de si bon cœur que nous finîmes bientôt.

Je fus assez heureuse pour conserver mon amant jusqu’à ce que des intérêts de famille et une riche héritière qu’il épousa, en Irlande, l’obligèrent à me quitter. Nous avions vécu à peu près quatre mois ensemble, pendant lesquels notre petit conclave s’était insensiblement séparé. Néanmoins Mme Cole avait un si grand nombre de bonnes pratiques que cette désertion ne nuisit en nulle manière à son négoce. Pour me consoler de mon veuvage, Mme Cole imagina de me faire passer pour vierge ; mais je fus destinée, comme il le semble, à être ma propre pourvoyeuse sur ce point.