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au soir de la pensée

activités générales qui s’ensuivent, aussi bien qu’à celles qui l’ont déterminée ? D’une découverte récente, il ne faut pas attendre un trop brusque jaillissement d’observations vérifiées. On a trouvé plus simple de nous annoncer la désintégration de la matière d’après le second principe de la thermodynamique, dit principe de Carnot. Et quand on a conduit l’univers à « la mort thermique », il faut bien en venir à l’oraison funèbre de l’énergie que nous n’avons pu distraire de la matière jusqu’à ce jour, en dépit d’une métaphysique acharnée. Ce sont sports d’altitude, a dit plaisamment l’un de nos novateurs. Si j’accepte très bien ma mort personnelle, je me résigne moins aisément à celle de l’univers, parce que, contrairement à tout ce que nous pouvons concevoir, elle suppose un arrêt d’évolution cosmique contre lequel s’inscrit toute donnée de notre connaissance positive. Il n’est pas jusqu’à l’hypothétique entropie elle-même à qui je refuse de me rendre, parce qu’elle implique on ne sait quelle forme d’évanouissement cosmique là où je ne découvre, comme j’ai dit plus haut, qu’une insuffisance d’observation. Remettons-nous donc d’une alarme si chaude, et donnons aux problèmes de cette envergure le temps des coordinations.

Pour déranger le vieil atome de son royal isolement et lui reconnaître un ensemble de fonctions inattendues, il a fallu les importantes découvertes qui ont bouleversé toutes nos conceptions antérieures de la physique mondiale. Des phénomènes scientifiquement observés ont exigé des interprétations nouvelles, et si plusieurs d’entre elles peuvent être sujettes à des remaniements — ce qui est la condition même de notre connaissance — on ne saurait leur opposer un « nescio vos » qui ne serait plus de notre temps.

Je prends telles que je les trouve les dernières conquêtes de la connaissance. On en a pu juger sommairement par mes citations de Rutherford, de Jean Perrin, de Henri Poincaré. Nul n’a le droit d’écarter l’expérience du monde physique aujourd’hui universellement acceptée, pas plus que de se refuser, de prime abord, aux interprétations, même hardies, de ces nouveaux phénomènes de positivité. Point de nouveauté scientifique, dans l’histoire, qui ait à ce point troublé l’accoutumance traditionnelle des esprits trop obstinément ankylosés.

La découverte du radium et du bombardement continu de