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l’atome

la communication de l’énergie. On nous parle déjà d’une matière encore plus subtile, et il n’y a pas de raison pour que l’éther ne puisse pas se présenter à différents degrés de condensation. En tout cas, il faudra toujours aboutir aux mouvements du milieu.

La théorie cinétique des gaz, qui nous conduit à celles des liquides et même des solides, nous montre des essaims de molécules engagés de toutes parts dans des successions de chocs qui ne s’arrêtent pas. « Ainsi, nous dit M. Henri Poincaré, les molécules échangent leurs vitesses jusqu’à ce qu’on arrive à une distribution moyenne de ces vitesses qui se maintient indéfiniment »[1]. Quelque chose comme une conciliation de la « mort thermique » et du mouvement.

Avant les mouvements des molécules, les mouvements des atomes. M. Jean Perrin a pu nous dire combien il y a d’atomes dans un gramme d’hydrogène : 683 000 milliards de milliards. Une autre manière de compter nous donne le chiffre de 650 000 milliards de milliards, et d’autres méthodes encore aboutissent à d’identiques résultats. Je n’insiste pas sur la valeur de ces remarquables coïncidences. Pour ce qui est des mouvements de l’atome, nous pouvons suivre l’étincelle des atomes d’hélium se détachant du radium.

M. Henri Poincaré imagine un géant se dirigeant vers nous du fond des abîmes célestes. Arrivé dans la lumière de notre Voie Lactée, tandis qu’il se demande si ce nuage lumineux est formé d’atomes ou s’il est à l’état d’une matière continue, il aperçoit des myriades de systèmes solaires et croit tenir les atomes cherchés. Pas du tout. Ce sont d’innombrables soleils, centres de systèmes planétaires. C’est-à-dire que l’immensité de son télescope lui montre identiquement le même spectacle que celui qui nous est offert, au microscope, par les soleils et les planètes atomiques en des correspondances de révolutions cosmiques. Autour du noyau central, les électrons décrivent leurs orbites à la façon des planètes. « Toute ionisation, écrit M. Jean Perrin, divise l’atome d’une part en un ou plusieurs corpuscules négatifs, de masse insignifiante[2], et d’autre part en un ion

  1. Les Conceptions nouvelles de la matière.
  2. La masse d’un électron est de 1 850 fois plus petite que celle d’un atome d’hydrogène.