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grandeurs et misères d’une victoire

durs combats de l’Yser, le Maréchal s’était montré un héros. Je n’ai garde de lui chicaner quoi que ce soit du magnifique élan qui le porta dans cette épreuve, l’une des plus ardues de la guerre, et je, lui ai rendu hommage, avec joie, sur ce point.

La question de savoir dans quelle mesure il fut véritablement un stratège peut être déplaisante pour un homme qui se laissait parfois comparer à Napoléon. C’est une question que l’historien devra résoudre, et je ne puis mieux faire que de m’en rapporter aux juges libérés des passions d’aujourd’hui. Cependant, j’ai bien le droit de dire que le brevet militaire d’académie civile décerné par M. Poincaré, dans le cénacle du palais Mazarin, n’a pas plus de valeur positive qu’une simple chanson. Il nous faudra, quelque jour, des juges compétents qui prononceront sur pièces, au lieu d’un lyrisme de plaidoirie. Les historiens qualifiés pourront alors prendre des conclusions et juger en connaissance de cause.

Le maréchal Foch, sans avis préalable, a ouvert la tranchée contre les camarades, dont l’un a pourtant Verdun à son compte, en décrétant, sans rien démontrer, que nous aurions pu finir la guerre en 1917. Avec des si, que ne prouve-t-on pas ? Ces sortes d’arguments sont la grande ressource des hommes en quête d’une diversion. S’il a cru qu’il ferait dévier ainsi la critique de sa propre stratégie, il s’est trompé.

— « Voyez-vous, disait-il, le commandement unique, ce n’est qu’un mot. En 1917 on l’avait « réalisé avec Nivelle, cela n’avait pas marché[1].

  1. C’était justement pour changer cet état de choses que le commandement suprême, c’est-à-dire le droit de parler comme un chef, lui fut donné. Or voici que ce droit précieux