Page:Cobb - L'enfer des sables, 1936.djvu/23

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Et, enfin, les deux hôtes furent conduits solennellement dans une superbe tente où les étoiles et les fourrures offraient à leur fatigue une couche confortable.

Mais Saint-Flavien ne songeait guère à dormir. Il sortit de la tente, alluma une cigarette et fit quelques pas dans le camp. Bakar vint le rejoindre ; et, voyant que l’aviateur jetait autour de lui des regards anxieux, il l’interrogea :

— Que cherchez-vous ?

— Les tentes des femmes. Si Catherine Chatel est dans le camp, c’est de ce côté qu’il faut la chercher. Le Maure lui montra des tentes blanchâtres groupées, autour desquelles veillaient des captifs :

— Les voici. Mais on ne vous laissera pas approcher…

— Voyons toujours…

La main appuyée sur l’épaule de Bakar et feignant de causer avec lui, il s’avança dans la direction désignée, mais en ayant soin de se tenir à distance.

— Si elle était là ? murmura-t-il. Comment le savoir ? Soudain, une idée lui vint, une idée folle. Il retrouvait dans son souvenir une vieille chanson de son enfance que tous les Français connaissent. Il se mit à fredonner assez haut pour être entendu à l’intérieur des tentes :

Dans les prisons de Nantes,
Il y a un prisonnier,
Que personne ne va voire
Que la fille du geôlier…

La chanson monta, mourut. Saint-Flavien sentait son cœur battre d’une angoisse étrange. Si Catherine Chatel était là, prisonnière, quelle émotion serait la sienne en entendant cet ancien refrain ? Mais la nuit restait muette, sous son grand vélum piqué d’étoiles. Si le camp des Maures avait son secret, il le gardait bien.

Après avoir erré encore quelques instants, toujours suivi de Bakar qui s’inquiétait, il rentra dans la lente