Page:Cobb - L'enfer des sables, 1936.djvu/26

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Le Maure se leva brusquement des coussins où il était assis :

— Un doute reste en ton esprit, blanc. Eh bien ! Pour le détruire, je transgresserai la loi que nos usages nous imposent. Tu verras nos femmes. Si un de mes guerriers s’est emparé par surprise de celle que tu cherches et qu’elle soit cachée ici sans que je le sache, il sera puni. Viens…

— Mais que ton compagnon nous attende ici. Ses yeux ne doivent pas voir ce que je vais te montrer.

Il conduisit Saint-Flavien vers les tentes des femmes. Il donna quelques ordres et le dépanneur, ébloui, vit ce que, sans doute, aucun regard d’Européen n’avait vu jusqu’ici.

Les femmes du camp, une à une ou en couples gracieux, apparaissaient aux ouvertures de tentes. Toutes étaient jolies, d’une grâce sévère, harmonieuse, avec des traits fins, des yeux magnifiques, au regard profond. Mais aucune ne ressemblait à une Française. Catherine Chatel n’était pas parmi elles. Ahmer Saloun, qui lut sa déception sur le visage de l’aviateur, eut un sourire de triomphe :

— T’avais-je menti ? Es-tu convaincu ?

Saint-Flavien eût pu répondre que cela ne prouvait pas grand’chose et que le camp était assez grand pour qu’on pût dissimuler une femme. Mais il savait que toute discussion serait inutile et dangereuse. Et puis, il avait dans sa poche le billet de la nuit lui donnant un rendez-vous mystérieux et il ne voulait plus songer qu’à cela :

— Un songe est un songe, dit-il gravement. Je te remercie, Ahmer Saloun…

Ce jour-là, comme la veille, l’avion survola tous les environs du camp. Saint-Flavien ne résista pas à la tentation d’aller rôder du côté de ces dunes de l’Est dont parlait le billet. Il les observa de très bas, sans se hasarder à descendre, ne vit rien et rentra au camp vers la fin de l’après-midi, se demandant si le mystérieux billet ne cachait pas un piège.