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LES

DERNIERS MARQUIS



Les vrais poëtes et les sincères artistes s’imaginent toujours que la beauté et la grandeur qui les émeuvent dans la nature et dans l’art, produisent un effet analogue sur tous les esprits et sur tous les cœurs ; ils ont des étonnements naïfs en voyant des êtres indifférents ou distraits traverser les magnificences de la campagne, et entendre sans tressaillir des vers et de la musique sublimes, ou bien regarder sans les comprendre un marbre et un tableau de maître ; ils se figurent généreusement que les êtres qui n’expriment point leur admiration par des paroles ou par une émotion visible, sentent en dedans, comme on dit, et que leur silence est de l’étonnement. Hélas ! leur silence est de la sécheresse et l’absence presque complète des notions du beau et du bien, inséparables jumeaux que les Grecs nommaient par le même mot.

Ce n’est pas que nous pensions que les esprits su-