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Sa femme était petite et svelte ; son bras, qu’on voyait à travers les flots de dentelle de sa manche, et son cou arrondi révélaient des formes mignonnes et potelées. Sa tête était assez jolie et pourtant disgracieuse ; des yeux noirs pleins d’éclat, sinon d’intelligence, un front harmonieux couronné de fins cheveux noirs lustrés en bandeaux plats rendaient la moitié de son visage très-attrayante ; mais l’autre moitié formait dissonance ; le nez était trop pincé, la bouche trop serrée, le menton trop fuyant ; le dédain, la sottise et quelque chose de mystérieusement faux se trahissaient dans la partie inférieure de son visage. Son sourire n’était jamais cordial. Elle souriait pourtant, en montrant des dents blanches, tandis que je la regardais ; elle provoquait déjà du coin de l’œil le bel Italien qui restait inerte et pensif.

Nérine me fit remarquer la toilette de la petite marquise qui était excessive pour cette heure matinale ; elle portait une robe en taffetas rayé où le blanc, le vert myrte et le vert azoff s’alternaient ; la jupe avait une ampleur démesurée qui se déployait jusque sur les vêtements de ses voisins de table. Le corsage collant dessinait tout le modelé de la taille ; des manches flottantes doublées de soie blanche, s’échappaient des dentelles ; un bracelet en camées de corail rose se jouait autour de son poignet gauche,