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avait trouvé son air, me dit-elle, et était toute disposée à me le faire entendre ; mais, ajouta-t-elle, avec une grâce affectueuse :

— Si vous étiez bien aimable, signor, vous resteriez à souper avec nous ; ce soir, je serai plus en voix, et notre chant vous paraîtra meilleur.

Son amant insista pour me retenir.

— C’est impossible, lui répondis-je, je suis attendu.

— Oh ! je comprends, una amica, reprit l’aimable femme. Eh bien, allons la chercher : j’aime ceux qui aiment.

Son idée me parut heureuse ; je pensai qu’Antonia serait émue à la vue de ce beau et jeune couple qui s’adorait, et qu’elle consentirait à venir passer la soirée avec nous. Nous montâmes en gondole. Arrivés devant la maison que nous habitions, je n’osai introduire mes nouveaux amis auprès d’Antonia avant de l’avoir prévenue. Je les priai de m’attendre.

Je trouvai Antonia à table.

— Je croyais que tu ne viendrais pas souper, me dit-elle.

— Je viens t’enlever, répliquai-je en riant et en l’embrassant pour rompre la glace ; et je lui racontai rapidement de quoi il s’agissait.

Elle me répondit, avec un étonnement superbe, que je divaguais ; qu’elle n’irait pas de la sorte courir les aventures. Amusez-vous, ajouta-t-elle ; moi j’accomplis un devoir et je reste.