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PROMENADE EN HOLLANDE

désirait, par quelque caprice, une fleur, un tissu, un bijou des contrées lointaines, qu’ils dussent aller lui chercher ! Ils s’exaltaient en lui parlant et s’enflammaient jusqu’au délire à son regard et à son sourire toujours un peu railleurs. Comme à chaque entrevue les mêmes tendres protestations recommençaient, elle surnomma les pauvres amoureux ses deux échos monotones.

En jetant à son père les quelques mots d’espoir qu’avait recueillis le bonhomme sur la possibilité de retrouver une Cythérée rose, Sulpicia s’était instinctivement souvenue du dévouement d’esclave d’Hermans et de Raynold ; et, quand son père l’appela auprès de lui et lui demanda si ce qu’elle avait dit n’était point une méchante ironie ajoutée à sa méchante action, elle répondit avec une certitude qui épanouit le cœur du docteur :

« Oui, mon père, il dépend de vous d’avoir avant un an un beau coquillage tout semblable à celui que vous regrettez. Il est à Leyde deux jeunes gens éperdument amoureux de moi (elle nomma Hermans et Raynold) ; vous connaissez leurs familles, ils sont tous deux riches et nobles, et vous accorderiez à l’instant ma main à celui des deux qui vous la demanderait. Eh bien ! laissez-moi réparer le mal que j’ai commis, laissez-moi leur imposer pour condition d’aller au Japon et de vous en rapporter une autre Cythérée rose ! Je suis certaine qu’à mon com-