Page:Collins - La Femme en blanc.djvu/208

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— Mon but, continuai-je, est d’obtenir que vous veuilliez revenir sur votre lettre, et ne pas me contraindre à déserter les droits légitimes de votre nièce ou de ses proches. Laissez-moi, une fois encore, vous bien expliquer la situation ; ce sera ma dernière tentative…

M. Fairlie secoua la tête, et poussa un soupir lamentable.

— Vous n’avez pas d’entrailles, Gilmore ; vraiment, vous n’en avez pas, dit-il ; mais, enfin, puisqu’il le faut, allez je suis à votre merci !…

Je lui signalai un à un, avec soin, tous les inconvénients de la mesure proposée ; je plaçai l’affaire devant lui, sous tous les aspects qui pouvaient la lui rendre intelligible. Aussi longtemps que je parlai, il demeura étendu dans son fauteuil, les yeux fermés. Il les rouvrit indolemment lorsque j’eus fini, prit sur la table sa cassolette d’argent, et se mit à la flairer avec un air de douce satisfaction.

— Ce bon Gilmore ! disait-il en reniflant de temps à autre… Comme il se montre bon et dévoué !… Cela réconcilierait, vraiment, avec les infirmités de la nature humaine !

— Accordez une simple réponse à une simple question, monsieur Fairlie. Je vous le répète, sir Percival Glyde n’a pas l’ombre d’un droit à réclamer autre chose que le revenu de cet argent. Le capital lui-même, si votre nièce n’a pas d’enfants, doit demeurer à sa libre disposition et faire retour à sa famille. Si vous restez ferme, il faudra que sir Percival fléchisse ; — il faudra qu’il fléchisse, vous dis-je, ou qu’il s’expose à la flétrissante imputation de n’avoir voulu épouser miss Fairlie que dans des vues mercenaires…

M. Fairlie me menaçait, en riant, de sa cassolette.

— Ah ! je vous y prends, mon vieux Gilmore !… vous avez horreur, n’est-il pas vrai, de tout ce qui touche à l’aristocratie ?… Comme vous détestez Glyde ! et cela tout bonnement parce qu’il est baronnet… Quel radical vous faites !… Oh ! quel affreux radical, mon bon ami !…

Un radical, moi !!! j’aurais pu supporter une forte dose de provocations, mais, après avoir professé toute ma vie