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permettre de m’asseoir, mais pas un pouce de plus. Le feuillage parfumé de l’arbuste que j’avais à ma gauche effleura ma joue, lorsque j’appuyai légèrement ma tête à la balustrade.

Les premiers bruits qui m’arrivèrent d’en bas furent ceux de trois portes que, successivement, on ouvrait ou on fermait, (cette dernière alternative, beaucoup plus probable que l’autre), sans doute les portes qui donnaient accès dans le vestibule et dans les chambres attenantes aux deux côtés de la bibliothèque, celles-là mêmes que le comte s’était promis d’explorer. Le premier objet que j’aperçus fut l’étincelle rouge qui, partie de la verandah et voyageant dans les ténèbres, s’avança dans la direction de ma fenêtre ; là elle fit halte un moment, et revint ensuite à son point de départ.

— Au diable votre agitation !… Quand donc comptez-vous vous asseoir ? grommela au-dessous de moi la voix de sir Percival.

— Ouf ! comme il fait chaud ! dit le comte, poussant un soupir de fatigue.

Son exclamation fut suivie du bruit métallique que faisaient les chaises de jardin quand on les traînait sur les briques dont la verandah était pavée. Ce son, bien venu, m’apprit qu’ils allaient s’asseoir comme à l’ordinaire dans le voisinage immédiat de la fenêtre. La chance, jusque-là, se prononçait en ma faveur. L’horloge du campanile sonnait minuit moins un quart au moment où ils s’installaient dans leurs fauteuils. J’entendis, par la fenêtre ouverte, un bâillement de madame Fosco, et je vis son ombre se dessiner une fois encore derrière le transparent lumineux.

Cependant sir Percival et le comte commencèrent à causer, modérant çà et là, un peu plus que de coutume, le diapason de leur voix, mais sans jamais en venir à se parler tout à fait bas. L’étrangeté de ma dangereuse situation et la crainte que m’inspirait, en dépit de moi-même, la fenêtre éclairée de madame Fosco, me rendirent d’abord difficile, — presque impossible, devrais-je dire, — de conserver ma présence d’es-