Page:Columelle - L'Économie rurale, Tome 1, trad Du Bois, 1844.djvu/107

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les années lui refusent, ne lui est pas restituée. La terre, au contraire, abandonnée soit volontairement, soit par quelque accident, répond, si on la remet en culture, au soin du cultivateur par de gros intérêts pour le repos dont elle a joui. Le vieil âge de la terre n’est donc pas la cause de la diminution de ses productions, puisque, quand une fois la vieillesse est venue, elle ne retourne point sur ses pas, et que nous ne pouvons ni rajeunir, ni reprendre la vigueur du jeune âge. Ce n’est pas, non plus, la lassitude du sol qui cause la diminution des produits : il ne serait pas sage de dire que, comme dans l’homme le corps se fatigue par un trop violent exercice ou par la surcharge d’un fardeau, de même la lassitude de la terre est le résultat des cultures et du remuement des champs. Qu’est-ce donc, me dites-vous, que cette assertion de Tremellius, qui observe que les lieux jadis incultes et sauvages, après avoir d’abord commencé par rapporter avec abondance, ne tardent guère à ne plus répondre avec la même fécondité aux travaux du laboureur ? Sans doute il voit ce qui arrive, mais il n’en a pas pénétré la cause. En effet, un sol neuf, et passant de l’état sauvage à la culture, n’est pas plus fertile parce qu’il a plus de repos et de jeunesse, mais parce que, durant de longues années, les feuilles et les herbes que la nature produit d’elle-même l’engraissant en quelque sorte d’une nourriture copieuse, suffisent pour lui procurer les moyens de faire naître et de nourrir des récoltes ; mais aussi, dès que la herse ou la charrue n’a plus de racines de végétaux à briser, que les bois abattus ne nourrissent plus de leur feuillage la terre qui les a produits, et que les feuilles qui, en automne, tombées des arbres et des buissons, couvraient la surface de la terre, venant à y être enfouies