Page:Columelle - L'Économie rurale, Tome 1, trad Du Bois, 1844.djvu/53

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

voisin pervers, quand, depuis le berceau, il a pu entendre dire, pour peu qu’il soit issu d’une bonne famille, que « Jamais on ne perdrait de boeufs, s’il n’était pas de mauvais voisins ; » ce qui ne se borne pas aux boeufs, mais s’étend à toutes les parties de nos propriétés. C’est à tel point, que beaucoup de gens se résoudraient à manquer de demeure, et à fuir leur domicile, pour éviter les désagréments d’un mauvais voisinage. Car que penser des peuples entiers qui ont gagné diverses contrées étrangères après avoir abandonné le sol paternel (je veux dire les Achéens, les Ibères, les Albaniens, les Siciliens, et, pour parler de ceux à qui nous devons notre origine, les Pélasges, les Aborigènes, les Arcades, si ce t’est qu’ils ne pouvaient supporter la méchanceté de leurs voisins ? Et pour ne pas citer seulement des calamités publiques, le souvenir nous a été conservé de malheurs particuliers ; et dans les contrées de la Grèce et dans l’Hespérie aussi, existèrent des voisins détestables : à moins qu’on ne prétende que quelqu’un pouvait trouver supportable le voisinage d’Autolycus, ou que Cacus, se fixant sur le mont Aventin, devait être agréable aux habitants contigus du mont Palatin. J’aime mieux me rappeler les anciens que mes contemporains, pour n’avoir pas à nommer un de mes voisins qui ne saurait souffrir dans le pays ni qu’un bel arbre étende ses rameaux, ni qu’une pépinière subsiste en bon état, ni qu’un échalas reste attaché à la vigne, ni même que les troupeaux paissent sans surveillance. C’est donc à bon droit, autant que me le dit mon opinion, que M. Porcius a pesé qu’on devait éviter une telle peste, et surtout a prévenu celui qui veut devenir agriculteur de ne pas, de son propre gré, s’exposer à un tel malheur. Ajoutons aux autres maximes celle qu’a léguée à la