Page:Columelle - L'Économie rurale, Tome 1, trad Du Bois, 1844.djvu/85

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homme consulaire et très riche, que pour un père de famille le fonds le plus productif était celui dont les fermiers étaient du pays, et qui, nés sur cette terre comme sur leur patrimoine, y restant dès le berceau, y avaient contracté de longues habitudes. Assurément, c’est bien mon opinion, qu’il y a de l’inconvénient à changer souvent de fermiers, et que le pire de tous est un fermier citadin qui aime mieux faire cultiver par ses gens que cultiver lui-même. Saserna disait qu’il fallait plutôt attendre d’un homme de ce genre des procès que des fermages ; qu’en conséquence, il fallait s’appliquer à retenir des fermiers villageois et diligents, quand nous ne pouvions pas nous livrer nous-mêmes à la culture ni la faire exécuter par nos gens : ce qui n’arrive que dans les cantons en proie à l’insalubrité de l’air et à la stérilité du sol. Au reste, quand l’un ou l’autre inconvénient est médiocre, les soins du fermier tirent toujours moins de produits de la terre que n’en obtient le maître, ou même son métayer, à moins d’extrême paresse et d’infidélité de la part de cet esclave. Mais il n’est pas douteux que le plus souvent ces désagréments ne proviennent de la faute du maître ou ne soient favorisés par lui, puisqu’il lui est loisible ou d’éviter de mettre un tel homme à la tête de ses affaires, ou de lui en retirer la gestion. Toutefois, quand une terre est éloignée au point qu’il soit difficile au propriétaire de s’y transporter, toute espèce de fonds prospérera plus sous des fermiers libres que sous des métayers esclaves : c’est ce qu’on peut dire surtout des terres arables, que le fermier ne saurait dévaster comme les vignes et les arbres. Les esclaves peuvent causer de grands dommages, soit en donnant à louage les bœufs de la terre, soit en les nourrissant mal, ainsi que les autres bestiaux, soit en ne labourant pas à propos, soit en faisant payer plus de semence qu’ils n’en ont confié aux sillons, soit en ne soignant pas, pour les faire prendre,