Page:Columelle - L'Économie rurale, Tome 2, trad Du Bois, 1845.djvu/377

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

sans fin, les vidanges de tous les poissons salés que l’on jette hors des boutiques des vendeurs de marée. Au reste, si j’ai nommé un aussi grand nombre d’espèces de nourritures, ce n’est pas qu’on les trouve toutes sur tous les rivages, mais c’est afin que l’on puisse donner celles d’entre elles dont on peut disposer.

[13] Parmi les fruits qui n’ont pas bien mûri, on peut leur jeter des figues pelées, des noix cassées avec les doigts, des cormes bouillies dans de l’eau, aussi bien que tous les aliments que leur peu de consistance rend propres à la déglutition, comme du fromage frais, si la localité et l’abondance du lait le permettent. Toutefois, nulle autre nourriture n’est aussi avantageuse que les salaisons dont nous venons de parler, parce qu’elles exhalent beaucoup d’odeur,

[14] et que les poissons plats reconnaissent mieux leur pâture par l’odorat que par la vue : car, comme ils reposent toujours sur le ventre, et que leurs yeux sont dirigés en haut, ils ne voient pas facilement à droite et à gauche les objets qui sont à terre ; tandis que, suivant à l’odeur les salaisons qu’on leur offre, ils parviennent bientôt à l’endroit où se trouve cette nourriture. Quant aux poissons saxatiles ou de la haute mer, bien qu’on puisse les nourrir des salaisons ci-dessus énumérées, ils préfèrent cependant ces mêmes aliments frais : aussi l’anchois nouvellement pris, l’écrevisse, le petit goujon, et tout le menu poisson sont fort bons pour le gros.

[15] Cependant si, durant les intempéries de l’hiver, on ne peut se procurer ce genre de nourriture, on distribue des boulettes de pain noir et, si la saison le permet, des pommes coupées par morceaux. En tout temps on peut donner des figues sèches, si, comme en Rétique et en Numidie, l’on en a en abondance. Au reste, on ne doit lias suivre l’exemple d’un grand nombre de personnes qui ne donnent rien à leurs poissons, persuadés qu’ils peuvent se suffire à eux-mêmes, bien qu’étant renfermés ;