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soirée, si elle obtenait une commande avec son
modèle.
Essoufflée, les jambes flageolantes, elle
pénétra pour la seconde fois dans l’atelier où,
trois mois auparavant, elle avait subi le contact
redoutable de l’ouvrière avec l’industriel. Était-
elle exigeante, alors ? Elle ne le croyait point,
puisque ses prétentions n’avaient jamais dépassé
le gain nécessaire à la plus simple subsistance.
Cependant de combien elles avaient été
rabaissées par les coups reçus, elle en eut l’intui-
tion lorsqu’elle accepta sans réclamer, le prix
de trente sous pour un travail qui allait lui
prendre au moins dix heures ! On lui remit du
nansouk et de la dentelle pour six chemises,
et elle sortit presque contente ! En cousant
quinze heures par jour, elle pourrait gagner
neuf francs en quatre jours. En « morte », il ne
fallait pas être difficile !
Si au moins les semelles de ses souliers pou-
vaient durer jusqu’à la reprise du travail !
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LA VIE TRAGIQUE DE GENEVIÈVE