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comptes rendus de l’académie des inscriptions

COMMUNICATION

CARACTÈRES GÉNÉRAUX DE LA LANGUE GRECQUE,
PAR. M. A. MEILLET, MEMBRE DE L’ACADÉMIE.

Il y a, depuis quelques années, chez les linguistes une aspiration à entrer dans des voies nouvelles, aspiration qui se traduit par des tentatives diverses, en partie peu précises.

Durant le xixe siècle, l’effort a porté surtout sur les éléments pour ainsi dire matériels du langage. C’était devenu un usage courant, à la fin du xixe siècle, que d’écrire des grammaires où les formes grammaticales étaient minutieusement décrites et où rien n’était dit de l’emploi qui en est fait. C’est grâce à ce travail obstiné sur des éléments faciles à observer et à fixer que l’on a pu constituer des familles de langues bien déterminées et faire des histoires exactes de la prononciation et des formes grammaticales. Mais on n’aperçoit aucun moyen d’établir un rapport intime entre une forme linguistique et les sociétés qui les emploient. On ne peut que constater des rapports de fait.

En étudiant les catégories grammaticales, on pouvait espérer qu’on trouverait des concordances entre l’existence de certaines catégories et certaines mentalités, certains types de civilisation. J’ai cru apercevoir que le nombre duel, fréquent à un certain niveau de civilisation, disparaît à un niveau plus élevé ; ceci s’observe en effet dans les groupes indo-européen, sémitique, finno-ougrien. Mais les concordances de ce genre sont peu nombreuses, et l’on n’arrive pas à en pousser la théorie bien avant.

Une étude récente du prince. N. Troubetskoy m’a donné l’idée d’essayer autre chose. Dans son livre, K probleme russkovo samopoznanija, 1927 (imprimé à Paris),