Page:Conan - À l’oeuvre et à l’épreuve - 1893.djvu/84

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— Quand vous vous serez un peu débattu contre l’amour, vous parlerez autrement.

Charles écoutait paisible et souriant. — Réginald, dit-il, tout à coup, vous rappelez-vous notre dernière soirée au Colisée… et ce que nous disions sur le bonheur de ceux qui ont tout sacrifié à Jésus-Christ ?

— C’est-à-dire ce que vous disiez… Sans doute, je m’en souviens… Mais vous êtes bel et bien condamné au bonheur de la terre. Il faut vous résigner. Toutes vos prières n’y pourront rien… Vous ne pouvez la fuir, donc vous l’aimerez. Il n’y a pas de cœur humain à l’épreuve de la beauté.

— Pas de cœur vide peut-être, murmura Charles levant les yeux au ciel. Mais quand le cœur est plein…

— La flamme pénètre partout. Vous l’apprendrez… Rentrons, fit le militaire d’un air sombre.

Une fois seul dans sa chambre, Charles Garnier, au lieu de gagner son lit, s’assit à sa table, et y resta quelque temps le front appuyé sur ses mains.

Puis, se levant, il alla s’agenouiller devant un Christ d’ivoire suspendu au mur, et tendant les bras vers l’image sacrée : « Ô Sauveur Jésus, murmura-t-il, que je ne vous sois pas infidèle ! que je fasse votre adorable volonté ! »