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ÉLISABETH SETON

larmes, il est semé de tant de croix, qu’assurément la joie se trouvera au bout avec le repos éternel.

« Regardez là-haut : les plus élevés au ciel ne furent-ils pas les plus abaissés sur la terre ? Ce qu’ils ont ambitionné le plus, c’était la pauvreté et l’humiliation, ces compagnes fidèles de leur Maître, et de notre Maître, pendant sa vie toute de douleur… Ayons seulement du courage, et nous marcherons vers le ciel avec la vitesse d’un bon coursier, au lieu de ramper et de nous traîner dans le chemin. Tout ce que je puis dire, c’est que notre Maître est trop bon, s’il nous donne à finir notre vie comme il a voulu passer la sienne, sans une place où reposer sa tête. »


Se croyant inutile, l’humble fondatrice n’avait pas prévu ce qui arriva. Mgr Carroll et son conseil la jugeant nécessaire à la communauté firent un règlement spécial en faveur d’Élisabeth, et par de sages exceptions lui permirent de se donner à toutes les misères humaines, sans cesser d’être à ses enfants.

Leur avenir était pour elle une source inépuisable d’anxiétés. Non qu’elle redoutât pour eux la lutte, la pauvreté, mais elle craignait pour leur foi, si la mort venait à l’enlever. Le cruel abandon de sa famille, qui l’avait tant aimée, lui prouvait quelle était sa haine contre le catholicisme. Elle écrivait à Antonio Filicchi :


« L’espérance, même si lointaine, que vous me donnez, qu’il serait possible que vous fissiez un voyage en ce pays-ci, est comme un rayon de lumière au milieu de mes sombres pensées sur l’avenir de mes pauvres enfants. Non que je me mette en peine pour leur fortune temporelle. Mais si la mort m’enlevait, s’ils étaient remis entre les mains de nos parents, ce serait la ruine certaine de leur croyance. Je remets tout, soyez-en certain, à Celui, comme vous le dites, qui nourrit les oiseaux du ciel. Mais, dans l’état d’affaiblis-