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LA COURONNE DE LARMES

homme environné d’une lumière céleste qui s’avançait vers elle avec une majesté incomparable. Quelque chose d’éblouissant, de divin, flottait sur son visage.

« — Ton amour m’attire, dit-il, je suis le Sultan des fleurs ; toutes les merveilles de la création m’appartiennent.

La jeune Musulmane le regardait avec ravissement.

— Seigneur, dit-elle, se prosternant à ses pieds, emmenez-moi dans votre patrie, je veux être votre esclave.

— Je n’ai point d’esclave, répondit-il avec une douceur infinie, et l’heure n’est pas venue de t’emmener, mais je veux bien te placer dans mes jardins. Quitte le palais de ton père, abandonne ta patrie pour jamais. Va, ne crains rien, traverse la mer, rends-toi à la ville d’Assise et fais-toi conduire au monastère de Saint-Damien. Frappe à la porte en disant : « Je viens servir le Maître des fleurs, et tu seras admise ».

— Seigneur, oh Seigneur, dit la jeune infidèle, vos paroles me pénètrent d’un bonheur si grand… Mais pourquoi vos mains, qui rayonnent, portent-elles ces traces de cruelles blessures ?

— C’est que je t’ai aimée jusqu’à la mort ».

La glorieuse apparition s’évanouit et, sans savoir comment, la fille du calife se trouva transportée hors des murs des jardins.

Son ignorance absolue de la vie, sa merveilleuse beauté l’exposait à bien des dangers. Elle ne connaissait de la terre que les jardins embaumés où s’était écoulée son enfance ; mais un chrétien qu’elle rencontra lui offrit ses services et se fit son guide.

Il lui fit échanger ses beaux voiles lamés et tissés d’argent contre un modeste costume de pèlerine, puis la conduisit à un port de mer, où un vaisseau français attendait ceux des croisés qui voulaient retourner en Europe.

Pour la fleur d’Orient, avide de soleil, la longue traversée s’écoula sans ennui. C’est que le souvenir de la glorieuse vision illuminait son obscure cabine, c’est