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SAINTE ROSE DE LIMA

de la douceur infinie de Dieu !… Je pars le cœur plein de joie, je m’élance vers le ciel pour jouir à jamais de Celui que j’ai toujours aimé ».

Sur le point d’expirer, elle supplia l’un de ses frères de lui retirer ses coussins, afin qu’elle mourût sur le bois comme son Rédempteur.

La douleur de sa mère lui inspirait une compassion tendre. On l’entendit prier le Seigneur de lui adoucir le déchirement de la séparation. Et sa prière fut exaucée, car au moment où Rose rendit le dernier soupir, sa mère divinement consolée fut obligée de se retirer pour cacher à tous les regards la joie dont elle se sentait transportée.

Cette joie surnaturelle fut partagée par tous ceux qui avaient le plus aimé Rose et les personnes qui entouraient sa dépouille mortelle, se sentirent irrésistiblement poussées à entonner des chants d’action de grâces.

Ce corps virginal immolé à la pénitence exhalait un parfum exquis, mélangé de lis et de roses, et une lueur mystérieuse l’entourait.

Le visage contracté par la souffrance avant la mort avait repris aussitôt après, sa parfaite régularité, sa merveilleuse beauté. Ses yeux s’étaient animés d’un éclat céleste ; on ne put les fermer et loin de prendre la fixité de la mort, ils gardèrent une expression ineffablement douce.

L’aspect de la morte remplissait d’un étonnement religieux et profond, tous ceux qui la regardaient. Rose était la fille d’un vieux soldat sans fortune, elle avait toujours vécu dans la plus profonde retraite, mais jamais la mort d’une souveraine ne produisit nulle part pareil émoi.

Dans tous les rangs de la société, depuis les plus infimes jusqu’aux plus élevés, il y eut un prodigieux ébranlement. Les habitants de Lima semblèrent comprendre ce qu’ils devaient à l’humble fille qui avait satisfait à la divine justice et le vice-roi dut envoyer sa garde pour protéger le corps contre la vénération de tous.