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PHYSIONOMIES DE SAINTS

mendiait, pour se procurer tout ce qu’il fallait aux malades qu’il allait chercher et dont il se faisait l’infirmier. Sa femme le secondait de toutes ses forces. Les pauvres disparaissaient à leurs yeux, Jésus-Christ était seul l’objet de leurs tendres soins.

Luchesio et Bonna Donna vieillirent heureusement ensemble, et terminèrent le même jour leur vie de travail, d’allégresse et de dévouement.

Bonna Donna tomba malade la première. Lorsqu’elle eût reçu les derniers sacrements, Luchesio, dont la douleur était extrême, lui dit :

« Tu sais, chère compagne de ma vie, comme nous nous sommes aimés pendant que nous servions Dieu ensemble. Pourquoi ne resterions-nous pas unis pour nous en aller aux joies ineffables ? Ah ! du plus profond de mon cœur je le demande à Dieu ».

Se sentant défaillir, il comprit qu’il était exaucé et envoya chercher son confesseur, le P. Nildebrand, des Frères-Mineurs. Le religieux le trouva mourant et lui dit :

« Très cher frère Luchesio, sois fort et prépare ton âme à aller au-devant de ton Sauveur ; car, tu peux m’en croire, le moment est proche où tu verras le salut et la couronne de gloire ».

À ces mots, Luchesio souleva un peu sa tête : « Aimable Père Nildebrand, répondit-il souriant, si j’avais attendu jusqu’à maintenant pour préparer mon âme, j’aurais encore confiance dans la miséricorde de Dieu ; mais à vrai dire, je sortirais de ce monde avec moins de sécurité, à cause de ce qu’il y a de redoutable dans le passage ». Et levant les bras vers le ciel : « Grâces à la Sainte Trinité, poursuivit-il, à la bienheureuse Marie toujours Vierge et à mon bienheureux père François, je me sens libre et prêt, et je crois que, non par mes mérites, mais par ceux de la Passion de Notre-Seigneur Jésus-Christ, j’échapperai aux pièges du démon ».

Il reçut les sacrements avec une piété céleste. Entendant dire que sa femme était à l’agonie, il trouva la force de se traîner près d’elle, prit ses mains entre