vanité, mais pour juger par l’expérience de leur
clarté et de leur effet, les deux qualités peut-être
sur lesquelles on peut le moins se juger soi-même.
Avec une telle intention, il ne choisissait pas ses
auditeurs : ceux que le hasard lui offrait, semblaient
devoir mieux représenter le public, dont il voulait
essayer sur eux la manière de sentir ; il ne se bornait
pas à recevoir leurs avis, ou plutôt leurs éloges,
souvent il leur demandait quel sens ils attachaient
à une phrase, quelle impression ils avaient éprouvée ;
et s’ils n’avaient pas saisi son idée, s’il avait
manqué l’effet qu’il voulait produire, il en concluait
que cette partie de son ouvrage manquait de netteté,
de mesure ou de force, et il l’écrivait de nouveau.
Cette méthode est excellente pour les ouvrages
de philosophie qu’on destine à devenir populaires,
mais peu d’auteurs auront le courage de l’employer.
Il ne faut pas cependant s’attendre à trouver un égal
degré de clarté dans toute l’histoire naturelle ;
M. de Buffon a écrit pour les savants, pour les philosophes et pour le public, et il a su proportionner
la clarté de chaque partie au désir qu’il avait d’être
entendu d’un nombre plus ou moins grand de lecteurs.
Peu d’hommes ont été aussi laborieux que lui, et l’ont été d’une manière si continue et si régulière ! Il paraissait commander à ses idées, plutôt qu’être entraîné par elles. Né avec une constitution à la fois très-saine et très-robuste, fidèle au principe d’employer toutes ses facultés, jusqu’à ce que la fatigue l’avertît qu’il commençait à en abuser, son es-