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ÉLOGE DE FOURCROY.

ignorée de leurs partisans, ils font retomber sur eux seuls le poids de leurs dissensions ; ils veulent ressembler à ces dieux des nations antiques qui, tranquilles dans le ciel, jouissaient des combats que se livraient en leur nom leurs aveugles adorateurs.

Fourcroy, chargé de porter au roi la nouvelle de la prise d’une ville, et de lui remettre directement les dépêches du général, eut le courage d’opposer aux questions du ministre l’ordre qu’il avait reçu de ne s’adresser qu’au roi. Il lui fut présenté ; le roi lui accorda la croix de Saint-Louis ; mais le ministre ne ratifia point cette grâce, et punit par là et l’officier et le monarque d’avoir pu croire l’un et l’autre que les récompenses ne dépendaient pas de lui seul.

Fourcroy, par son application pendant la paix, mérita d’être employé dans la guerre qui la suivit : il fit trois campagnes en Allemagne, tantôt avec l’artillerie, alors réunie au génie ; tantôt comme ingénieur. Il commanda les officiers du génie pendant l’année 1761, sur les côtes de Bretagne, où l’on préparait une descente à Belle-Isle, et en 1762, dans la campagne de Portugal, au siège d’Almeida.

La paix n’est point un temps de repos pour un officier du corps du génie. C’est par la méditation, par l’observation des places, l’examen de leurs détails, la lecture de nombreux mémoires, fruits précieux de l’expérience et des réflexions de militaires éclairés, qu’il se prépare à exercer l’art d’attaquer et de défendre les villes, qu’il s’instruit dans les moyens d’en perfectionner la construction, qu’il étudie les rapports des places entre elles, qu’il apprend à re-