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ÉLOGE DE M. D’ALEMBERT.

Cassel, et de la Société philosophique de Boston, naquit à Paris le 17 novembre 1717.

Nous ne chercherons point à lever le voile dont le nom de ses parents a été couvert pendant sa vie ; et qu’importe ce qu’ils ont pu être ? les véritables aïeux d’un homme de génie sont les maîtres qui l’ont précédé dans la carrière ; et ses vrais descendants sont des élèves dignes de lui.

Exposé près de l’église de Saint-Jean-le-Rond, M. D'Alembert fut porté chez un commissaire, qu’heureusement l’habitude des tristes fonctions de sa place n’avait point endurci ; il craignit que cet enfant débile et presque mourant ne pût trouver dans un hospice public les soins, les attentions suivies, nécessaires pour sa conservation ; il en chargea une ouvrière dont il connaissait les mœurs et l’humanité ; et c’est de ce hasard heureux qu’a dépendu l’existence d’un homme qui devait être l’honneur de sa patrie et de son siècle, et que la nature avait destiné à enrichir de tant de vérités nouvelles le système des connaissances humaines.

Cet abandon, qui peut-être n’était même qu’apparent, ne dura que très-peu de jours ; le père de M. D’Alembert le répara aussitôt qu’il en fut instruit ; il fit pour l’éducation de son fils, et pour lui assurer une subsistance indépendante, ce qu’exigeaient la nature et le devoir : sa famille regarda M. D’Alembert, tant qu’il fut inconnu, comme un parent à qui elle devait des soins et des égards ; et lorsqu’il fut devenu célèbre, elle s’honora de ces liens que la reconnaissance avait resserrés.