Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 7.djvu/189

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C’est donc encore un véritable devoir de favoriser la découverte des vérités spéculatives, comme l’unique moyen de porter successivement l’espèce humaine aux divers degrés de perfection, et par conséquent de bonheur, où la nature lui permet d’aspirer ; devoir d’autant plus important, que le bien ne peut être durable, si l’on ne fait des progrès vers le mieux, et qu’il faut, ou marcher vers la perfection, ou s’exposer à être entraîné en arrière par le choc continuel et inévitable des passions, des erreurs et des événements.

jusqu’ici, un très petit nombre d’individus reçoivent dans leur enfance une instruction qui leur permette de développer toutes leurs facultés naturelles. À peine un centième des enfants peut-il se flatter d’obtenir cet avantage, et l’expérience a prouvé que ceux à qui la fortune l’a refusé, et qu’ensuite la force de leur génie, aidée d’un heureux hasard, a mis à portée de s’instruire, sont restés au-dessous d’eux-mêmes. Rien ne répare le défaut de cette éducation première, qui seule peut donner et l’habitude de la méthode, et cette variété de connaissances si nécessaire pour s’élever dans une seule à toute la hauteur que naturellement on pouvait se flatter d’atteindre.

Il serait donc important d’avoir une forme d’instruction publique qui ne laissât échapper aucun talent sans être aperçu, et qui lui offrît alors tous les secours réservés jusqu’ici aux enfants des riches. On l’avait senti même dans les siècles d’ignorance. De là ces nombreuses fondations pour l’éducation des pauvres ; mais ces institutions, souillées par les pré-