Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 7.djvu/390

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menter, pour la généralité des individus, les jouissances, le bien-être que les travaux de ces professions leur procurent, et d’étendre dans la classe même des pauvres une partie de ce bien-être. Dans un pays où les arts fleurissent, le pauvre est mieux logé, mieux chaussé, mieux vêtu que dans ceux où ils sont encore dans l’enfance. Cette augmentation de jouissances est-elle un véritable bien ? N’est-elle pas plus que compensée par l’existence des nouveaux besoins, suite nécessaire de l’habitude du bien-être ? C’est une question de philosophie que je ne chercherai point à résoudre, mais il est certain du moins que l’accroissement successif des jouissances est un bien, tant que cet accroissement peut se soutenir et remplacer par de nouveaux avantages ceux dont le temps a émoussé le sentiment. je connais un pays ou les pauvres n’avaient pas de fenêtres il y a quarante ans, et ne recevaient le jour que par la moitié supérieure de la porte, que l’on était obligé de laisser ouverte. J’ai vu l’usage des fenêtres y devenir général. Ce changement sera peut-être très indifférent au bonheur de la génération suivante : mais il a été un véritable bien pour ceux qui en ont joui les premiers. Or, c’est précisément une augmentation toujours progressive de jouissances pour les pauvres que l’on doit attendre de ce progrès général des arts mécaniques, résultat nécessaire d’une instruction bien combinée.

Elle aura de plus l’avantage d’établir une égalité plus grande entre les hommes qui pratiquent les arts ; elle rapprochera les enfants de l’artisan pauvre