Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 7.djvu/420

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théorie utile et la pratique éclairée. Le savant y trouvera des observations de détail que ses expériences n’auraient pu lui faire connaître ; l’homme de l’art y puisera des principes qui auraient échappé à ses recherches. La chaîne de l’activité humaine ne sera point interrompue depuis les plus sublimes méditations du génie jusqu’aux opérations les plus vulgaires des arts mécaniques.

Ces sociétés auront, de plus, l’avantage d’offrir un encouragement à ceux qui aiment à exercer leur raison, qui s’occupent plus de la perfection réelle de leur art que de leurs propres succès ; surtout elles empêcheraient l’esprit de routine, celui de système, celui d’école, de s’emparer de la pratique des arts. Ce dernier avantage ne serait pas rempli si, écartant de ces sociétés toute idée de corporation, toute inégalité relative aux fonctions, aux grades que ceux qui les composeraient auraient hors du sein de la société, on n’y établissait une entière égalité, une liberté absolue dans les choix ; si ces sociétés sont autre chose que la réunion des hommes qui, successivement et par leur propre suffrage, se sont déclarés les plus éclairés dans l’art dont ils doivent accélérer les progrès. On a vu, dans un autre mémoire comment l’intérêt de leur propre gloire les défendrait alors contre les mauvais choix ; ici le préservatif serait plus sûr encore. Une académie de médecine dont les membres ne seraient appelés par aucun malade, une académie de peinture à laquelle on ne demanderait pas de tableaux, une académie militaire dont les membres ne seraient