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La politique d’ailleurs n’avoit pas encore de principes assez constans, pour que l’on n’eût pas à craindre de voir les législateurs porter dans ces combinaisons leurs préjugés et leurs passions.

Leur objet ne pouvoit être encore de fonder sur la raison, sur les droits que tous les hommes ont également reçus de la nature, enfin, sur les maximes de la justice universelle, l’édifice d’une société d’hommes égaux et libres, mais seulement d’établir les lois suivant lesquelles les membres héréditaires d’une société déjà existante, pourroient conserver leur liberté, y vivre à l’abri de l’injustice, et déployer au dehors une force, qui garantît leur indépendance.

Comme on supposoit que ces lois, presque toujours liées à la religion, et consacrées par des sermens, auroient une durée éternelle, on s’occupoit moins d’assurer à un peuple les moyens de les réformer d’une manière paisible, que de prévenir l’altération de ces lois fondamentales, et d’empêcher que des réformes de détail n’en altérassent le systême, n’en corrompissent l’esprit. On