Page:Conrad - Gaspar Ruiz, trad. Néel.djvu/46

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

du général San Martin lui-même. Il avait une communication importante à faire au général en chef.

Por Dios, Señores, elle me fît avaler tout cela, en se donnant pour le porte-parole du pauvre garçon. Écrasé par l’injustice, il espérait trouver en moi une générosité égale à celle qui lui avait été témoignée par la famille royaliste chez qui il avait trouvé un refuge.

Ah ! c’était bien et noblement parler à un jouvenceau comme moi. Je la jugeai grande. Hélas, elle n’était qu’implacable !

Je finis par m’éloigner, plein d’enthousiasme, et sans même demander à voir Gaspar Ruiz, dont la présence dans la maison me paraissait certaine.

Puis une réflexion plus calme me fit entrevoir des difficultés que je n’avais pas assez de confiance en moi pour surmonter seul. Il n’était pas facile d’aller raconter au général en chef une histoire semblable. Je redoutais un échec, et jugeai préférable d’exposer le cas à mon général de division, Robles, un ami de ma famille, qui m’avait, depuis, réclamé comme aide de camp.

Tout de suite et sans cérémonie il me soulagea de mes doutes.

— « Dans la maison ! Naturellement, il est dans la maison », fit-il d’un ton méprisant. « Vous auriez dû y entrer l’épée à la main, et lui ordonner de se rendre, au lieu de bavarder sous le porche avec une jeune royaliste. Ces gens-là auraient dû être expulsés depuis longtemps. Qui sait combien d’espions ils ont hébergés en plein milieu de nos camps ? Un sauf-conduit du général en chef ? Le bonhomme a de l’audace. Ha ! Ha ! Nous allons le prendre ce soir, et nous verrons bien, sans sauf-conduit, ce qu’il a de si important à dire. Ha ! Ha ! »

Le général Robles — paix à son âme — était un homme gros et court, avec des yeux ronds, fixes, et un regard de féroce jovialité. Il ajouta, devant ma détresse :

— « Allons, allons, chico ; je vous promets sa vie s’il