Page:Conrad - Typhon, trad. Gide, 1918.djvu/13

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jusqu’à la passerelle, et s’emparant dévotement du riflard, il en secouait les plis, leur redonnait de l’ordre et, autour de la tige qu’il tenait verticale, les roulait en un rien de temps ; il accomplissait cette cérémonie avec un visage empreint d’une augurale gravité, et M. Salomon Rout, le mécanicien en chef qui fumait son cigare du matin sur la claire-voie détournait la tête pour cacher un sourire :

— « C’est vrai ! le sacré riflard.

— Merci bien Jukes, merci », grommelait le capitaine Mac Whirr, cordialement, sans lever les yeux, en reprenant le parapluie.

L’imagination de Mac Whirr suffisait tout juste à le porter au jour suivant ; ce qui lui permettait d’être très sûr de lui ; ce qui lui permettait aussi de ne s’affecter de rien. C’est l’imagination qui nous rend susceptibles, arrogants et difficiles à contenter ; tout navire commandé par le capitaine Mac Whirr devenait le flottant asile de l’harmonie et de la paix. À vrai dire les écarts fantaisistes lui étaient aussi interdits que le montage