Page:Conrad - Typhon, trad. Gide, 1918.djvu/162

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fois le sommet d’un cône d’eau s’écroulait à bord et se mêlait à l’agitation roulante de l’écume sur le pont submergé ; et des nuages bas fermaient circulairement la citerne au fond de laquelle le Nan-Shan barbotait. Ce cercle de vapeurs denses tournoyait d’une façon folle autour de son centre si calme, entourait le navire comme un mur ininterrompu d’un aspect inconcevablement sinistre. À l’intérieur du cercle, la mer agitée comme par une propulsion interne s’élevait en montagnes à pic qui cherchaient à se chevaucher et se heurtaient entre elles et claquaient pesamment contre les flancs du Nan-Shan, cependant qu’un gémissement affaibli, l’infinie plainte de la fureur de la tempête arrivait de par delà les confins de ce calme oppressant.

Le capitaine Mac Whirr restait silencieux. Jukes, l’oreille tendue, perçut soudain le rugissement lointain et traînant de quelque immense lame invisible qui prenait son élan sous l’épaisse obscurité formant l’effroyable limite de son cercle visuel.