Page:Conrad - Typhon, trad. Gide, 1918.djvu/38

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glisse entre les doigts. » Induction tirée du cas particulier du capitaine Mac Whirr, dont l’honnêteté évidente avait tout le poids et l’épaisseur d’un bloc.

M. Jukes, lui, célibataire et incapable de généralisations, avait pour confident habituel un vieux camarade de bord, actuellement second officier d’un transatlantique. C’est à lui qu’il ouvrait son cœur, insistant sur les avantages de la navigation de commerce en Extrême-Orient, avec des allusions au trafic occidental qu’il dépréciait d’autant. Il exaltait les ciels, les mers, les navires, la vie facile. Le Nan-Shan, certifiait-il, n’avait pas son pareil pour tenir la mer.

« Ici pas d’uniformes chamarrés », disaient ses lettres ; « ici nous sommes tous des frères. Les repas se prennent en commun ; c’est une vie de coq en pâte… Les types de la chaufferie sont aussi décents qu’on peut souhaiter pour des gens comme ça ; notre chef est un bon zigue. Nous sommes bons amis. Quant au vieux, on n’imagine pas un capitaine plus placide. Par moments, tu jurerais qu’il est