Page:Conrad - Typhon, trad. Gide, 1918.djvu/89

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qui portait le capitaine ainsi que son second, et que l’homme de barre enfermé dans la timonerie avec la grande peur d’être balayé par-dessus bord en paquet avec tout le reste — le chateau milieu était pareil à quelque roche de demi-marée comme on en voit au bord des côtes. Pareil à une roche, au large, assiégée, circonvenue, battue, vaincue par le flux — à une roche dans le ressac, à laquelle se cramponnent encore les désespérés naufragés qu’un restant de vie abandonne — mais la superstructure, elle, s’enfonçait, remontait, roulait sans cesse, roche flottante, roche-épave, qu’un miracle aurait arrachée et balancerait sur la mer.

Le Nan-Shan était pillé par la tempête, mis à sac avec une aveugle furie : voiles de cape arrachées de leurs jarretières, tendelets et cagnards emportés, passerelle nettoyée, imperméables crevés, lisses tordues, écrans broyés… De plus, deux des canots avaient déjà disparu ; ils étaient partis, sans qu’on les voie ou les entende, fondus eût-on pu dire dans l’exigence du tourbillon. Ce ne fut que plus tard, dans