Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/299

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doyen des tisserands s’avança au milieu d’eux et dit :

— Messires, je vous amène le plus grand ennemi de la France, et le plus noble chevalier de Flandre. Une raison importante, à laquelle la vie de l’homme le plus généreux est attachée, lui défend de se faire connaître à vos seigneuries en ce moment ; ne prenez donc pas de mauvaise part qu’il tienne la visière baissée et aussi qu’il ne parle pas, car sa voix est connue de vous tous comme la voix de votre mère. Ma fidélité éprouvée vous est un gage que je n’amènerais pas de faux-frères.

Les chevaliers s’étonnèrent de cette explication, et cherchèrent dans leur mémoire le nom de l’inconnu ; cependant, comme la présence du Lion captif ne leur paraissait pas possible, leurs suppositions furent vaines. Ils eurent, néanmoins, pleine confiance en la prudence du doyen des tisserands, et envoyèrent leurs serviteurs dans des directions différentes, pour les garder de toute surprise. De Coninck commença ainsi :

— Messires, la captivité de nos illustres souverains a été très-cruelle aux Brugeois. Il est vrai que nous nous sommes souvent révoltés, parce qu’on voulait violer nos principes, et peut-être avez-vous pensé que nous aurions fait cause commune avec les Français ; mais réfléchissez qu’un peuple libre et généreux ne peut souffrir des maîtres étrangers ; aussi avons-nous, depuis le guet-apens du roi Philippe le Bel, exposé bien souvent notre vie et nos biens : plu-