Page:Considérations sur la France.djvu/145

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mode dans ce pays) de dire qu’on y étoit esclave : mais pourquoi donc trouvoit-on dans la langue françoise le mot de citoyen, avant même que la révolution s’en fût emparé pour le déshonorer, mot qui ne peut être traduit dans les autres langues européennes ? Racine le fils adressoit ce beau vers au roi de France, au nom de sa ville de Paris :

 Sons un Roi citoyen, tout citoyen est roi.

Pour louer le patriotisme d’un François, on disoit : c’est un grand citoyen. On essaieroit vainement de faire passer cette expression dans nos autres langues : gross burger en allemand[1], gran citadino en italien, etc., ne seroient pas tolérables[2]. Mais il faut sortir des généralités.

  1. Burger ; verbum humile apud nos et ignobile. J. A. Ernesti, in Dedicat. Opp. Ciceronis, pag. 79.
  2. Rousseau a fait une note absurde sur ce mot de citoyen, dans son Contrat Social, liv. I, chap. VI. Il accuse, sans se gêner, un très-savant homme d’avoir fait sur ce point une lourde bévue ; et il fait, lui Jean-Jacques, une lourde bévue à chaque ligne ; il montre une égale ignorance en fait de langues, de métaphysique et d’histoire.