Page:Constant - Le Cahier rouge, éd. Constant de Rebecque.djvu/76

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j’écrivis à John Wilde et j’en reçus une réponse si pleine d’amitié que je me promis bien de ne pas quitter l’Angleterre sans l’avoir revu.

En attendant, je continuai à vivre à Londres, dînant frugalement, allant quelquefois au spectacle et même chez des filles, dépensant ainsi mon argent de voyage, ne faisant rien, m’ennuyant quelquefois, d’autrefois m’inquiétant sur mon père et m’adressant de graves reproches, mais ayant malgré cela un indicible sentiment de bien-être de mon entière liberté. Un jour au détour d’une rue, je me trouvai nez à nez avec un autre étudiant d’Édimbourg devenu docteur en médecine et placé assez avantageusement à Londres. Il se nommait Richard Kentish et s’est fait connaître depuis par quelques ouvrages assez estimés. Nous n’avions pas eu à Édimbourg de liaison fort étroite, mais nous nous étions quelquefois amusés ensemble. Il me témoigna une extrême joie de me retrouver, et me mena tout de suite chez sa femme que je connaissais d’ancienne date, parce que, pendant que j’achevais mes études, il était arrivé avec elle pour l’épouser à Gretna Green, comme cela se pratique quand les parents ne veulent pas consentir